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Travail,
Famille, Mairie
de Pierre Merejkowsky
Je mange une tartine
beurrée avec du beurre de la Normandie.
"Pourquoi as tu sangloté ?" dis-je. "Excuse-moi,
je ne voulais pas te faire de la peine" répond Zède.
Zède ne me fait pas de peine. Elle téléphone à
son ancienne copine. Son ancienne copine lui a téléphoné
la semaine dernière. Je ne téléphone pas à
mon ancienne copine. La voisine Enne ne téléphone pas à
Zède. La voisine Enne allume la lumière. Zède ne
sait pas si elle a eu raison d'acheter un pyjama/chemise de nuit de trois
mois. Il existe des pyjamas unisexes pour enfants de un mois. Mais il
est préférable d'être lucide et d'être clairvoyante.
Les enfants de un mois ne conservent pas longtemps leur taille de un mois.
Je n'ai pas acheté de pyjama/chemise de nuit de un mois. Je n'ai
pas téléphoné au Délégué Général
du Service Culturel de la Mairie. Doublevé a répété
qu'il ne voulait pas empiéter sur ma vie privée et que j'avais
eu tort de considérer qu'il avait empiété sur ma
vie privée. Il n'a aucune raison d'empiéter sur ma vie privée.
Je n'ai pas dit à Doublevé que je n'avais pas téléphoné
au Délégué Général du Service de l'Action
Culturelle et Territoriale de la Mairie. J'ai pris un café dans
la brasserie avec Doublevé. Doublevé m'a parlé. J'ai
parlé à Doublevé. Nous nous sommes parlés.
Nous avons bu du café. Nous n'avons pas mangé de tartines
beurrées de la Normandie. Les femmes Juges pour Enfants battus
ont bu du thé aromatisé. Elles ne nous ont pas adressé
la parole. Elles ont fumé des cigarettes. Je n'ai pas dit à
Doublevé que Igrèk m'avait envoyé une sixième
carte postale. Je ne veux pas mêler mes histoires de coeur à
ma vie privée. Doublevé m'a peut-être donné
des mauvais conseils, mais ses conseils partaient d'un esprit de solidarité.
Il ne peut pas assumer mes ruptures sentimentales. Je n'aime pas Igrèk.
J'aime Zède. Je ne suis pas responsable des élans amoureux
de Doublevé. Je ne suis pas un manipulateur. Je n'ai pas incité
Doublevé à louer une voiture de grosse cylindrée
afin de laisser entendre qu'il exerçait la prestigieuse profession
de producteur de cinéma. Je n'ai pas organisé de casting
sauvage dans la maison de campagne de sa grand-mère. Doublevé
ne m'a jamais conseillé de rompre avec Zède Je n'ai pas
conseillé à Doublevé de ne pas mettre un enfant au
monde. La femme mariée séduite a eu envie de donner la vie
à un enfant. Mon ami psychiatre a refusé de rencontrer Doublevé.
Mon ami psychiatre n'a pas envie de mettre un enfant au monde et il n'a
pas envie de fréquenter une femme mariée séduite.
Zède n'a pas envie de rencontrer mon ami psychiatre. Elle n'a pas
envie de fréquenter des psychiatres qui se bagarrent avec des boxers
de la campagne. Doublevé ne se bat pas avec des boxers de la campagne.
Doublevé m'a conseillé de clarifier ma situation. Nos copines
ont de l'affection pour nous. Et il est inutile de les peiner inutilement.
Il est parfaitement évident que dans ces conditions, j'ai intérêt
à ne pas évoquer toutes les cinq minutes ma relation passée
avec Igrèk. Igrèk ne veut pas empiéter sur ma vie
privée. Elle me conseille simplement de clarifier ma situation.
Je suis parfaitement libre de mettre en enfant au monde et d'acheter un
pyjama/chemise nuit de un mois Il sera ensuite particulièrement
déplacé que je me plaigne en présence de Igrèk
de ma situation. Igrèk ne m'a pas incité à mettre
un enfant au monde. Mon ami psychiatre ne se plaint pas de sa situation.
Il n'a pas mis d'enfant au monde. Il filtre systématiquement ses
appels téléphoniques. Il ne comprend pas qu'un téléphone
puisse dicter le cours d'un emploi du temps. La mère de Igrèk
a conseillé à mon ami psychiatre de mettre des enfants au
monde. Mon ami psychiatre n'a pas conseillé à Igrèk
de mettre un ou plusieurs enfants au monde. Il m'a sereinement répété
qu'il n'avait aucune envie de rencontrer Doublevé. J'entretiens
manifestement avec Doublevé un rapport pervers. Mon ami psychiatre
a reconnu que j'avais le droit de fréquenter un ami pervers. Je
n'entretiens pas de relation perverse avec Igrèk. Une maison de
paysans locaux est imprimée sur la sixième carte postale
que m'a envoyée Igrèk. Igrèk a collé un timbre
sur le côté gauche de la sixième carte postale. Igrèk
a écrit qu'elle désirait que nous restions amis. Elle a
précisé qu'elle ne voulait pas intervenir dans ma vie privée.
Elle est très heureuse que Zède attende un enfant. L'arrivée
d'un enfant est toujours un bonheur. Elle pourra lui donner les pyjamas/chemises
de nuit de deux ans de sa nièce. Elle n'est pas certaine que les
vêtements de deux mois correspondront à la taille future
du futur bébé, certains bébés à la
naissance sont plus grands que des bébés de un mois. Je
n'ai pas lu à Zède la lettre de Igrèk
Zède pelle la peau des radis. La peau des radis renferme des germes.
"Je voudrais vivre une grossesse sereine" affirme Zède
"Tu veux que je t'aide à peler les radis afin d'enlever les
germes qui peuvent être dangereux pour le futur embryon ?"
dis-je
"Tu crois que j'ai eu raison d'acheter un pyjama de un mois ?"
demande Zède
"Certains enfants à la naissance sont plus grands que des
enfants de deux mois" dis-je. "Tu crois ?" demande Zède
"Oui" dis-je.
"Tu ne me parles plus jamais de ton travail, autrefois tu me parlais
de ton travail, je suis devenue étrangère à ta vie,
affirme Zède
"Je ne veux pas être la cause externe de tes sanglots. Je n'ai
pas envie de faire la connaissance de ta mère" dis-je.
La porte d'entrée s'ouvre.
Un moineau traverse la cour.
La voisine Enne ne veut pas nous déranger. Elle désire emprunter
une plaquette de beurre de la Normandie.
"Ca va ?" questionne la voisine Enne
Je vais bien. Je ne sanglote pas. Je verse le beurre de la Normandie dans
un récipient carré.
"Tu ne veux pas dîner avec nous ?" demande Zède
"François n'a pas répondu à ma dernière
lettre, tu crois qu'il va me répondre ?" demande la voisine
Enne
"Je ne sais pas" dis-je
"Tu l'aimes encore ?" demande Zède
"Oui" répond la voisine Enne.
"Je n'ai pas téléphoné au Directeur du Service
de l'Action culturelle et territoriale de la Mairie" dis-je. "J'ai
des crampes la nuit, j'espère qu'elles ne vont pas se prolonger
pendant toute ma grossesse" dit Zède "Tu ne veux pas
manger un oeuf avec nous ?" ajoute Zède. "Non, j'ai déjà
dîné, je veux juste un peu de beurre de la Normandie pour
demain matin" affirme la voisine Enne. Zède regrette de ne
pas vivre une grossesse plus sereine. Ses parents ne critiquent pas sa
situation familiale. La voisine Enne ne connaît pas ses parents.
Elle ne doit pas affirmer que ses parents critiquent sa situation familiale.
Ses parents sont des parents tolérants. Sa mère n'est pas
opposée à faire ma connaissance. Doublevé n'a jamais
rencontré la mère de la femme mariée séduite.
Il n'a pas envie de mêler sa vie privée à la vie privée
d'autres parents. Il ne sait pas si j'ai raison de refuser d'enfiler un
pantalon propre. La mère de Zède ne me connaît pas.
Elle ne m'a pas demandé d'enfiler un pantalon propre. Doublevé
a répété qu'il ne voulait pas empiéter sur
ma vie privée. "Je ne t'ai jamais demandé de me présenter
ton ami psychiatre" a précisé Doublevé "Je
n'ai jamais cherché à savoir pourquoi Igrèk a toujours
obstinément refusé de me rencontrer" a ajouté
Doublevé. "Je dois déménager les affaires de
ma petite nièce chez son grand oncle, Doublevé ne pourrait
pas me prêter sa voiture ? " questionne ensuite la voisine
Enne. "Je refuse d'empiéter sur la vie privée de Doublevé"
dis-je. "J'avais cru comprendre que Doublevé empiétait
sur ta vie privée et que tu acceptais que ton entourage empiète
sur ta vie privée" note la voisine Enne.
Je range le beurre de la Normandie dans le frigidaire de Zède.
Je ne possède pas de frigidaire. Je possède un vélo
et une radio à piles. Je n'apprécie pas la compagnie des
voisines de Zède. Zède apprécie la compagnie de ses
voisines. Zède est libre d'apprécier la compagnie de ses
voisines. Je n'ai pas de pouvoir décisionnel sur la fréquentation
de ses voisines, ni sur l'utilisation des voitures de grosses cylindrées
de mon entourage. Je ne suis pas le gestionnaire des voitures de grosses
cylindrées de mon entourage. Je ne cherche pas à exercer
un pouvoir décisionnel. Je ne cherche pas à exercer une
future autorité paternelle sur un futur enfant. Je ne cherche pas
à empiéter sur la vie privée de mon entourage. Je
n'ai jamais cherché à empiéter sur la vie privée
de Doublevé. Il est faux de décréter que je cherche
à prendre le pouvoir. Mes notes d'intention importante ne présentent
aucun point en commun avec une prise de pouvoir. Il est nécessaire
de clarifier la situation. Mon ami psychiatre est manifestement perturbé.
Il a pris la décision de partir en vacances avec Igrèk et
avec sa mère. Je ne l'ai pas incité à partir en vacances.
Je n'ai pas empiété sur sa vie privée. Je n'aime
pas les réunions de famille. Je n'aime pas les vacances. Je n'ai
pas proposé à la voisine de Zède de passer ses vacances
avec mon ami psychiatre. Mon ami psychiatre porte des pantalons propres.
La voisine Enne ne porte pas de pantalon. Elle porte des tailleurs chatoyants.
Je n'aime pas les pantalons propres. Je n'ai pas associé mon ami
psychiatre à la rédaction de mes notes d'intention importante.
Je n'ai pas incité mon ami psychiatre à engager un combat
avec le chien boxer. Je ne fréquente pas les chiens boxers. Je
ne fréquente pas les voisins de la campagne. Je n'ai pas demandé
à mon ami psychiatre de passer ses vacances avec Zède. Je
ne lui pas conseillé de rompre avec Igrèk. Je n'avais aucune
raison de provoquer une rupture entre mon ami psychiatre et Doublevé.
Doublevé ne peut pas fréquenter tous mes amis. Il ne veut
pas fréquenter mon ami psychiatre. Mon ami psychiatre n'a pas le
temps de fréquenter la future mère de notre futur enfant.
Mon ami psychiatre ne supporte pas les couples mariés, concubins
ou institutionnalisés. Mon ami psychiatre ne comprend pas le processus
mental qui conduit à une procréation affichée. Zède
ne participe pas aux séminaires de formation qu'organise mon ami
psychiatre. Igrèk refuse de continuer à fréquenter
mon ami psychiatre. Igrèk veut bien continuer à me fréquenter.
Elle n'a pas envie de fréquenter Zède. Je n'ai jamais dit
à Doublevé que Igrèk ne voulait pas l'inviter chez
elle. L'amant précédant de Igrèk se déplaçait
en moto. Igrèk n'a pas envie de nouer une relation avec un homme
qui se déplace dans une voiture de grosses cylindrées. Igrèk
se déplace en transports en commun. Moi j'évite de me déplacer.
Je n'ai aucune envie de me déplacer. J'ai tort d'être paranoïaque.
Igrèk ne veut pas fréquenter Doublevé. Igrèk
ne me téléphone plus. Mon ami psychiatre ne me téléphone
plus. Je me réfugie dans la défense de la rédaction
de mes notes d'intention importante. Il est impossible de vivre sans projet.
Je dois lutter contre ma paranoïa. La paranoïa aboutit à
un repli sur soi même. Il est impossible de vivre sans une communication
perpétuelle et renouvelée avec un entourage. Le futur enfant
de Zède appréciera ma compagnie. Il n'y a aucune raison
de ne pas apprécier ma compagnie. Je n'ai aucun élément
qui me permette de décréter que le futur enfant de Zède
sera incapable de supporter ma compagnie et ma paranoïa. Un repli
sur soi moi même implique la négation de son entourage. Zède
est enceinte. Je suis le père géniteur. Il est impossible
de nier le fait qu'elle soit enceinte. Ma mère m'aime. Zède
m'aime. Elle attend un enfant d'un homme qu'elle aime. Toutes les mères
aiment leurs fils. Notre existence se construit autour des relations que
nous nouons jour et nuit avec notre entourage. Je ne suis pas opposé
à entrer en contact avec mon entourage ou avec l'entourage de Zède.
J'ai parfois envisagé de me présenter aux élections.
J'ai cependant toujours renoncé à me présenter aux
élections. Je n'ai aucune raison de sombrer dans un proche avenir
dans un discours ou dans une attitude paranoïaque. La rédaction
de mes notes d'intention importante ne concerne pas une candidature à
une élection.
Il faut garder la tête froide et je garderai la tête froide.
Il ne faut rien exagérer.
Je n'appartiens pas à ces groupes d'individus qui renient leur
personnalité à la faveur de la plus petite opposition. Il
n'y a pas d'opposition déclarée. La voisine Enne, mon ami
psychiatre, Doublevé et Igrèk ne s'opposent pas à
la rédaction de mes notes d'intention importante. Ma mère
et mon père ne s'opposent pas à la rédaction de mes
notes d'intention importante. La future mère de notre futur enfant
ne s'oppose pas à la rédaction de mes notes d'intention
importante. Il ne faut pas s'enfermer dans une attitude négative.
Il est impossible de vivre sans l'espoir de la réalisation d'un
projet. Une existence se construit autour de la conception et de la réalisation
d'un projet. Un enfant de sexe masculin ou de sexe féminin ne peut
pas vivre sans la définition d'un projet éducatif. L'attaché
Culturel et Territorial de la Mairie définit des projets territoriaux
et culturels. Un couple sans projet ne peut espérer se prolonger
dans le temps. Une Mairie sans projet culturel ne peut développer
une politique sociale. Mon père et ma mère ont des projets.
La voisine Enne a des projets. Elle ne partira pas en vacances cet été
avec un ami au Portugal. Elle visitera des musées. Seule. Zède
a des projets. Elle n'a pas pour l'instant le temps de s'occuper de ses
projets. Elle a ajourné la réalisation de ses projets. C'est
un ajournement provisoire. Lorsque notre futur enfant aura pris la décision
de naître, ses projets seront de nouveau d'actualité. Je
ne compte pas renoncer à la réalisation de mes projets.
La rédaction de mes notes d'intention importante définit
le cadre de mes projets. Il faut s'assumer. Je dois m'assumer. Il est
impossible de vivre sans s'assumer. Mes parents s'assument. Doublevé
s'assume. Mon ami psychiatre s'assume. L'Attaché Culturel et Territorial
m'a laissé entendre que je devais m'assumer. Le Chef de Service
de Zède assume ses décisions. Les employés de son
Service seront désormais tenus de notifier le menu de leur semaine
avant le milieu de la semaine précédant la prise de la consultation
territoriale. Zède mange dans l'après midi un hors d'oeuvre
et un plat principal. Le matin je mange un oeuf. Je ne mange pas de second
oeuf. La tante maternelle de Zède a offert un grille pain pour
l'anniversaire de Zède. Cette tante a beaucoup d'affection pour
Zède. La tante de Zède n'attend pas d'enfant. Je mange également
une tartine grillée. Je range le beurre de la Normandie dans le
frigidaire. Je ne range pas mes notes d'intention importante dans le frigidaire.
Je glisse la note d'intention importante dans une chemise en carton. Je
glisse ensuite la chemise en carton dans une enveloppe. Je bois parfois
un verre de lait. Je ferme à double tour la porte de l'appartement
de Zède. La voisine Enne ferme la porte de son appartement à
double tour. L'assurance ne rembourse pas les vols des appartements si
les portes des appartements n'ont pas été fermées
à double tour.
Je tourne en rond sur le palier. La copine célibataire de l'ingénieur
du palier inférieur appuie systématiquement avant moi sur
le bouton d'appel de l'ascenseur. Elle se lève systématiquement
avant moi. Je ne me lève pas à heure fixe. Je mange systématiquement
un oeuf et une tartine beurrée de la Normandie. Je ne sais pas
si la copine célibataire de l'ingénieur du palier inférieur
mange systématiquement des tartines beurrées de la Normandie.
Je ne surveille pas ses allés et venus. La voisine Enne surveille
mes allées et venues. Elle a déclaré en ma présence
et en présence de la meilleure amie de Zède que je me levais
systématiquement après elle.
Un Avis est collé sur la porte principale de l'entrée unique
de la maison.
Les Avis ne sont pas systématiquement collés sur la porte
principale de l'entrée unique de la maison.
Un pigeon poursuit un moineau.
Une voiture pétarade.
Je ne lis pas l'Avis de la co-propriété.
Je ne lis jamais les Avis de la co-propriété.
+ suite
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