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Travail, Famille, Mairie
de Pierre Merejkowsky


Il faut s'assumer. Nous devons nous assumer. Je dois m'assumer. Nous devons tous nous assumer. L'Etat n'a aucune raison de nous assumer. La Liberté de l'Homme et de la Femme passe par son Indépendance. L'Indépendance dépend du Travail. Un Homme ou une Femme qui ne travaille pas ne peut pas s'assumer. Une Civilisation qui est incapable de s'assumer n'est plus une Civilisation. Une Civilisation d'assisté n'est plus une Civilisation. La Civilisation repose sur des Droits, sur des Devoirs et sur le Lien social. Le Travail est le vecteur du Lien Social. Le Dialogue est le fondement du Lien Social. L'absence de Dialogue entraîne la rupture du Lien Social. Le Lien Social tisse la trame de la Démocratie. Le Chômage entraîne la rupture du Lien Social. L'Assistanat permanent et perpétuel ne peut se concevoir dans une Société qui ne dialogue pas. Le Dialogue est la condition nécessaire de la Liberté. Sans la Liberté, il est impossible de vivre dans une Démocratie. La Démocratie est le bien le plus précieux. C'est un bien qui peut être remis en cause du jour au lendemain. Rien n'est acquis d'avance. Je suis coupable. La femme que je fréquente chaque soir s'assume. Elle exerce une profession. Zède n'est pas une assistée. La voisine Enne qui fréquente chaque soir Zède travaille. Elle n'est pas une assistée. Elle s'assume. Zède n'a aucune raison de m'assumer. La voisine Enne n'a aucune raison de m'assumer. La voisine Enne a le droit de jouir de son espace de liberté. Elle a acheté un appartement. Son appartement est son seul bien. Elle a le droit de jouir de son bien dans la paix et dans le repos. Elle ne peut pas assumer tous les problèmes de son entourage. Elle doit assumer ses propres problèmes. Elle ne peut pas assumer tous les problèmes de la Société. Elle doit songer à se préserver. Zède ne peut pas assumer tous les problèmes de la Société. Elle doit songer à se préserver. L'équilibre personnel de Zède dépend de sa faculté de récupération. Il est impossible d'écouter les peines de coeur et les récits des tracasseries administratives. La résistance humaine a ses limites. Il est indispensable de respecter ses propres limites. La voisine Enne cherche à se préserver. Elle n'est pas la victime d'un complot. Elle n'est pas le jouet de manipulations administratives ou affectives. Elle est victime de sa naïveté. Elle ne veut plus être la victime de sa naïveté. Elle dîne parfois avec Zède. Je dîne tous les soirs avec Zède. Nous dînons parfois avec la voisine Enne. Zède et la voisine Enne ne sont pas des assistées. Zède et la voisine Enne ne cherchent pas à m'assumer. Je suis responsable de mon asservissement. Je ne travaille pas dans la structure d'un cadre prédéterminé. Je dois me prendre en charge. Ma liberté personnelle dépend de ma propre prise en charge. Zède et la voisine Enne n'ont aucune raison de me prendre en charge. Je ne leur ai jamais demandé de me prendre en charge. Je n'ai pas envie d'être pris en charge. Zède et la voisine Enne ne cherchent pas à m'assumer. Je suis responsable de ma dépendance. Je ne suis pas enfermé par des forces répressives. La Société ne me réprime pas. La concierge ne me réprime pas. Les citoyens ne me répriment pas. Les Services Secrets ne me surveillent pas. Les Services de l'Action Culturelle et Territoriale de la Mairie ne me répriment pas. Je n'ai aucune raison d'être surveillé par les Services de l'Action Culturelle et Territoriale de la Mairie. J'ai le droit de commander un café crème. J'ai le droit de manger des gâteaux. J'ai le droit d'étaler du beurre de la Normandie sur une tartine. J'ai le droit de dire "je t'aime", j'ai le droit de dire "je ne t'aime plus", j'ai le droit de me réveiller, j'ai le droit de me déplacer entre les immeubles de mon quartier, de ma ville, de mon pays. Je suis libre. Je suis libre de ne pas m'assumer. Je suis libre de m'assumer. Zède attend un enfant. Je suis le père de l'enfant. Je dois m'assumer. Un enfant a besoin de s'assumer. Un enfant a besoin d'un père et d'une mère. Je suis le père. Zède est la mère. Zède n'a pas encore acheté de berceau. Zède ne veut pas déménager. Zède ne lit pas ma seconde note d'intention importante. Zède lit le journal des informations. Je ne lis pas le journal des informations. Il est faux et absolument abusif de laisser entendre que je suis la victime d'un complot. J'écoute la radio municipalisée. Zède m'aime. Mes amis m'aiment. Mes parents m'aiment. Mes sept enfants m'aiment. Je n'ai jamais parlé de complot. Je suis parfaitement lucide sur cette question. Je réponds à toutes les questions qui me sont posées. J'ai le droit de répondre à toutes les questions qui me sont posées. Je ne me tais pas. J'ai le droit de parler. J'ai le droit de laisser entendre que mon activité principale se concentre autour de la rédaction simultanée de plusieurs notes d'intention importante ou au contraire autour de la rédaction d'une seule et unique note d'intention importante. Je ne suis pas une victime du délire de la persécution. J'ai le droit de refuser de dévoiler la finalité de la rédaction de cette seconde note d'intention importante. J'assume la responsabilité de mes silences. Mes silences ne sont pas motivés par un refus de communication. Je communique. Je téléphone deux fois par semaine à la Secrétaire du Service de l'Action Culturelle et Territoriale de la Mairie. Je n'ai pas peur d'être la victime du vol de mes notes d'intention importante. Je ne cultive pas la méfiance. Je ne suis pas un agriculteur. Je ne cultive aucune plante, ni aucune suggestion. Zède n'est pas la victime d'un complot. Ma mère n'est pas la victime d'un complot. Je ne suis pas la victime d'un complot. Mon mutisme n'est pas la conséquence de la découverte d'un complot. Je reconnais que je suis le seul responsable de ma dépendance.
Je suis coupable.
Il est inutile d'accuser mon entourage, ou Zède. Ou mon passé. Je suis responsable de mon présent. Zède attend un enfant. Je suis le père géniteur futur de son enfant. Elle m'aime. Je l'aime. Nous nous aimons. Elle ne me demande pas de m'assumer. Elle ne me reproche pas de ne pas m'assumer. Elle a choisi de vivre avec moi. J'ai choisi de dîner tous les soirs avec elle. Je ne lave pas la vaisselle tous les soirs. Elle ne me demande jamais si je rédige une grande note d'intention importante ou si je rédige une brève note d'intention importante. Je ne parle jamais de la rédaction de mes notes d'intention importante. Zède ne rédige jamais de note d'intention importante. Zède assume son quotidien. La voisine Enne assume son quotidien. Elles assument leur quotidien. Elles reçoivent du courrier. Elles répondent au courrier. Elles reçoivent parfois des mots sur les répondeurs de leur téléphone enregistreur. Elles répondent toujours aux messages qu'enregistrent les voix de leurs amis, de leurs proches, de leurs parents, de leurs anciennes belles-mères, de leurs grands-pères, de leurs cousines, de leurs cousins, de leurs anciens amants ou de leurs futurs amants. Elles ne vivent pas dans l'isolement. Elles n'ont pas choisi de vivre dans l'isolement. Je n'ai pas choisi de vivre dans l'isolement. Nous faisons l'amour trois fois par semaine. Zède et la voisine Enne lavent la vaisselle sale tous les matins. Je me lave tous les soirs. Zède se lave les cheveux le mercredi matin. Elle dîne parfois avec des amies femmes. Je ne dîne pas avec ses amies femmes. Ses amies femmes dînent dans son appartement. Elles exercent une profession. Elles ne sont pas divorcées. Elles sont mariées. Elles élèvent des enfants en bas âge ou des adolescents plus âgés. Elles ne se réfugient pas derrière le paravent de la rédaction d'une note d'intention importante. Elles s'assument. Je ne suis pas la victime de ma propre inconsistance. Je ne cherche pas à composer un rôle. Je ne me réfugie pas derrière des phrases vides de sens. Je ne cherche pas à m'imposer. Il est faux de prétendre que je cherche à m'imposer. Je n'élève pas des enfants en bas âge, ni des adolescents plus âgés. Je rédige des notes d'intention importante. Mes notes d'intention importante concernent le champ de ma propre conscience. Je n'ai pas envie de laisser entendre que la rédaction de mes notes d'intention importante est destinée à faciliter mon insertion dans le corps social de la société civile et libérale. Je n'aime pas le corps social de la société civile et libérale. La prise en charge de mon insertion ne dépend pas des questions qui me sont posées. Je ne pose pas de question. Je me tais. Zède ne se tait pas. Ses parents se taisent depuis plus de vingt quatre ans à la suite d'événements que je ne connais pas et que je ne cherche pas à connaître. Je ne veux pas être mon propre ennemi. Je ne veux pas poser de question. Je n'ai pas d'ennemi. Je n'ai encore une fois jamais dit que j'étais la victime d'un complot. Je suis parfaitement lucide sur mon cas. Je suis responsable de ma situation. Je ne m'assume pas et je suis parfaitement responsable de ce manque flagrant et permanent de la prise en charge de ma responsabilisation sociale et personnelle.
Mon manque de maturité ne concerne pas mes seules activités journalières. Je ne dors pas dans le lit qui a été installé dans la pièce que j'occupe à titre gracieux. Je dors la nuit dans le lit de Zède. Je ne me souviens jamais de mes rêves. Je suis lucide. J'ai des désirs. Je n'ai pas envie d'exposer mes désirs. L'exposé d'un désir s'inspire d'un système de fuite. Zède rêve. Elle ne fuit pas. Elle rêve à voix haute. Je ne comprends pas les paroles qu'elle prononce pendant la nuit. La nuit, par temps de tempête, le vent soulève le rideau. Par temps d'acalmie, le vent ne soulève pas le rideau. La lune éclaire les lampadaires. Les pas menaçants des passants descendent la rue ou remontent l'avenue ensoleillée lorsque le soleil brille. La Mairie n'est jamais ouverte la nuit au public. Les lustres du Salon d'Honneur de la Mairie éclairent les réceptions privées. L'entrée dans le Salon d'Honneur de la Mairie obéit à la stricte délivrance d'un carton d'invitation. Je n'ai jamais été invité à assister à une réception. Un drapeau est planté jour et nuit sur le sommet du toit de la Mairie. Je ne sais pas si je rêve. Je ne souhaite pas rêver. Je suis ne suis pas paranoïaque. Il est faux d'affirmer que je suis un paranoïaque. Zède n'a jamais dit que j'étais un paranoïaque. Je ne veux pas répondre à ses questions. Je ne sais pas si je vais bien. Je mange avec appétit. Je dors sous un coussin. Je range mon stylo dans le plumier. Je bois de l'eau minérale. Je ne mange jamais de chocolat. Mes notes d'intention importante ne sont pas destinées à m'assurer un bien être passager. Je ne quémande pas un bien être passager. La rédaction de mes notes d'intention importante est indépendante de l'absorption d'un poulet dominical digéré dans la douce quiétude d'une famille unie autour d'un poste de télévision à jamais éteint. Je n'aime pas les poules. Je n'aime pas les poulets. Je n'aime pas les cochons d'Inde. Je n'aime pas les oies grasses. J'aime les canards. Je n'aime pas les avenues ensoleillées. Je n'aime pas le soleil. Je ne regarde pas les seins nus que les femmes exposent sur les plages ensoleillées. Je ne demande pas à Zède si elle va bien, si elle se sent bien. Je ne lui demande pas pour quelle raison elle continue de vivre. Je ne travaille pas dans un hôpital. Je ne lui demande pas si elle envisage de contacter dans un proche avenir un ancien amant qui aurait la générosité de se porter garant de l'identité de notre futur nouveau-né. Je ne porte pas d'enfant. Je ne suis pas enceinte. Je ne lui demande pas si elle est heureuse d'être enceinte. Je ne lui demande pas si elle a envie de me quitter. Je ne lui demande pas si elle a passé une bonne journée dans l'enceinte de son bureau. Je ne veux pas donner des nouvelles de ma santé. Je ne suis pas enrhumé. Je n'ai pas mal à la tête. Je n'ai pas mal au ventre. Je n'ai pas envie de dormir. Je ne rêve pas dans la journée. Je lis les récits des erreurs judiciaires dans le journal des informations. J'ai le profil de l'erreur judiciaire. Je suis une erreur judiciaire. J'ai eu tord de naître. "Ton enfant n'a pas demandé à naître" dit Zède
"Oui" dis-je
"Tu es d'accord, n'est ce pas ? insiste Zède.
"Oui" dis-je

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