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Doté d'un budget ridicule comparé à celui des Etats-Unis, la France entend miser sur la coopération européenne pour faire face, en matière de guerre électronique, au nouvel ordre mondial. Objectif : créer un "grand système de renseignement européen" "Les moyens mis à la disposition des militaires devront leur permettre de neutraliser les systèmes et réseaux électroniques indispensables à la vie économique de la nation adverse". Cette petite phrase est tirée d'un rapport parlementaire, on ne peut plus dense, intitulé "La politique spatiale française : bilan et perspectives". Etabli par le sénateur Henri Revol, il a été rendu public début mai au nom de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. A l'en croire, la France inscrirait donc elle aussi, comme les Etats-Unis, l'aspect offensif de la guerre de l'information dans sa stratégie militaire (voir "La guerre de l'information aura bien lieu"). Le "plan prospectif à 30 ans", qui "guide les actions de préparation du futur au sein du ministère de la Défense", ne dit pas mieux : "Le système de forces C3R (Commandement, Conduite, Communications, Renseignement) a pour objectif de maîtriser linformation, cest à dire dassurer le recueil, le traitement, la diffusion et le stockage des informations. Il vise également à dégrader, leurrer ou détruire si nécessaire les fonctions C3R de l'adversaire." Le rapport évoque même le pseudo-risque de « Pearl Harbor de l'espace », gimmick sensationnaliste inventé par le complexe militaro-industriel américain pour faire fructifier son business à force d'effrayer politiciens, médias et grands publics. Car en matière de "cyberguerre", qu'a t-on vu jusqu'à présent ? Des effets d'annonce, des guéguerres visant à défigurer telle ou telle page d'accueil de tel ou tel serveur mal configuré, mais rien qui vaille vraiment l'appellation de "guerre électronique" (voir Qui a peur de la cyberguerre ? et FUD : explosion d'un concept abracadabrantesque... ), si l'on excepte la destruction, par les Américains, des systèmes de communication irakiens lors de la guerre du Golfe, ou encore des opérations d'espionnage initiés par Israël ou, encore, les USA. Les Etats-Unis, dont l'objectif premier "s'exprime en termes d'accroissement de la dominance informationnelle mondiale" et vise à "la préservation de la supériorité technologique américaine", font donc forcément figure d'épouvantail sinon de modèle à suivre. La répartition des budgets spatiaux militaires dans le monde est pour ainsi dire sans appel : Etats-Unis - 94,8 %, Europe - 3,9 %, Russie - 1 %, reste du monde - 0,3 %. Le rapport rappelle également que "les enjeux sont considérables et les retombées aussi bien civiles que militaires", ne serait-ce qu'en terme d'emplois, et de recherche et développement. Ainsi, le renouvellement des satellites "obsolètes" américains reviendrait à 375 milliards de francs, le pré-programme de bouclier spatial (ou "Star Wars") est estimé quant à lui à 450 milliards (sans même parler de son intensification prévue par l'équipe Bush), quand le budget total de la Défense en France avoisine à peine les 190 De plus, le rapport avance que "globalement, on peut estimer à 40 % la diminution des crédits consacrés aux programmes spatiaux militaires" en France. Si le rapport ne s'étend guère sur les capacités d'écoutes et d'interceptions des Français (auquel le Nouvel Observateur consacrait récemment un dossier), il évoque néanmoins la poursuite des "programmes de télécommunication (Syracuse III et essaim de microsatellites d'écoute) et d'observation (Hélios II et post-Hélios II, petit satellite THR, après 2012)", le lancement d'"une constellation de quatre petits satellites d'observation permettant le survol de n'importe quel point du globe toutes les 12 heures" et le développement d'"une capacité d'observation de l'espace qui se révélera particulièrement utile si les Etats-Unis persistent dans leur projet de Missile Defense". Ces projets pourraient être mis en place à un échelon européen, bien que la coopération communautaire en la matière ne soit, et c'est un pléonasme, "pas toujours facile à mettre en oeuvre". Et de citer plusieurs programmes, initiés avec l'Angleterre ou l'Allemagne par exemple, qui ont finalement échoué et ont été recentrés sur des bases essentiellement nationales. Le rapport, qui parle d'un "retard notoire par rapport aux Etats-Unis", préconise ainsi la mise en place d'"un système unifié, éventuellement conçu et opéré par un acteur civil", en vue de réduire les coûts, "outil spatial militaire commun qui pourrait, dans un premier temps, résulter de la fédération et de l'interopérabilité des moyens nationaux", allant jusqu'à évoquer la mise en place, à l'horizon 2005, d'un "grand système de renseignement européen" qui s'inscrirait en complément du projet de force d'action rapide de la Communauté. Rapport sur la politique spatiale française : bilan et perspectives : http://www.senat.fr/rap/r00-293/r00-29337.html //:retour@top
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