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Les rapports vert, gris et vert-de-gris
(cinéma expérimental, linstitutionnalisation impossible)

 

De l'ACIDE à l'A.C.I.D.

Ironie de l'histoire (bis), la notion d'" indépendance " cinématographique est également aujourd'hui synonyme de renouveau du cinéma américain, et mondial (mais il n'y est plus question d'esthétique), mais a aussi été reprise en France par une autre… A.C.I.D. (Association des Cinéastes Indépendants pour leur Distribution), groupement et lobby de cinéastes qui, malgré l'influence des multinationales et l'économisme du ministère, a réussi à s'infiltrer dans le débat, et les commissions. Il est à noter que l'A.C.I.D. n'a jamais daigné prendre en compte les pratiques et revendications des cinéastes différents et expérimentaux, qui le leur rendent d'ailleurs généralement bien. Il est à noter également que ses créateurs sont également ceux qui furent, avec Guy Fihman et Claudine Eizykman, entre autres, élus à main levée en 1973 lors du putsch des premiers sur le département cinéma de Paris VIII, et que les uns comme les autres y exercent toujours aujourd'hui un pouvoir et un contrôle que d'aucuns n'hésitent pas à qualifier d'" absolu ". Le verrouillage des instances de décision est toujours d'actualité et nombreux sont ceux qui dénoncent, sous couvert d'anonymat, l'académisme et les manœuvres pour le moins douteuses des uns comme des autres. Si leurs discours s'avèrent souvent pertinent, il y a toujours aussi peu de reconnaissance, et d'argent, en provenance des institutions… Il faut donc toujours autant se battre pour assurer sa survie et arriver à tourner, développer, monter et diffuser un film. Rien n'a vraiment changé.

Épilogue

Pire, peut-être, la " nouvelle génération " de cinéastes et d'amateurs d'arts cinématographiques s'est construite sur l'héritage, le non-dit et les ruines de cette histoire " oubliée " que fut, et est encore, la lutte de ceux qui, dans les années soixante-dix, voulaient faire la révolution, ont conquis le pouvoir et monopolisé le débat. Si l'on excepte le mouvement des laboratoires indépendants, il n'y a pas eu depuis de véritables formes de réflexion (et encore moins de revendications) collectives en vue d'améliorer le sort et le travail des cinéastes. Quoi qu'on pense des responsabilités et des raisons qui ont présidé à cet échec manifeste du cinéma " indépendant " quand il se confronte à l'institution (tout ça pour l'équivalent d'une seule avance sur recettes…), la mise en place de tels mécanismes d'aides auraient profondément bouleversé le cinéma de ces vingt dernières années, et reste plus que jamais d'actualité.

Sources :

. " Dialoguer avec le cinéma expérimental " (G. Hennebelle, R. Bassan, R. Copans, D. Serceau, J.F. Marguerin, G. Courant, J. Dubuisson, D. Noguez, Cl. Brunel, G. Fihman, S. Le Péron, A. Akika, M. Lemaître, A. Sudre, P. Kirchhofer, Cinéthique, Cl. Eizykman, C. Lebrat) in Cinéma et politique - Actes des journées du cinéma militant de la Maison de la Culture de Rennes 1977-78-79, Paris, Papyrus/Maison de la Culture de Rennes, coll. " CinémAction ", 1980, pp. 129-157.

. Compte-rendus du colloque d'Avignon des 13 & 14 mai 1978 (Cl. Brunel et K.M.P.).

. " Rapport sur les différentes possibilités d'aides de l'État au cinéma indépendant (ou différent) et expérimental " (dit " rapport vert ") du groupe d'étude constitué au colloque d'Avignon (J.P. Ceton, G. Fihman, R. Lowder, G. Rey, G. Martedi, D. Noguez, Y. Rollin), juillet 1978.

. " Observations et remarques sur les différentes possibilités d'aide de l'Etat au cinéma indépendant - expérimental, et sur le rapport élaboré par le groupe d'étude constitué au colloque d'Avignon le 13-14 mai 1978 " (G. Martedi).

. Pré-rapport gris intitulé " Le merdier ", du nom dun film américain ayant pour cadre le Viet-Nam (P. Kirchhofer).

. Rapport gris de K.M.P. (Kirchhofer, Meichler, Wharry).

. " Communication au Colloque de Lyon " et " Déclaration de retrait des films du C.J.C. " de M. Klonaris et K. Thomadaki.

. " Désillusions ", tract de La Candeur Gronde Association " à l'adresse du colloque du cinéma indépendant de Lyon ".

. " Le cinéma différent en France " (Cl. Brunel, in Cinéma différent n°21-22, juin 1978), " Les très riches heures du cinéma différent et expérimental français " (M. Mazé, in Cinéma différent n° 23-25, juillet-août-septembre 1979), " Les très riches heures du cinéma expérimental " (M. Mazé, in Cinéma différent n° 26-28, mars-avril-mai 1980).

. " Colloque de Lyon " (R. Lowder), " Historique Paris Avignon Lyon " (Cl. Eizykman), " Coop Pol " (G. Fihman), " Contre le compromis historique du cinéma indépendant au sens large, pour le cinéma indépendant au sens spécifique " (A. Sudre), in Melba n° 6-7 (février 1979), " Nouvelles de l'underground (ter) " (réponse de P. Kirchhofer, non publiée).

. " Nouvelles de l'underground : le cinéma souterrain d'avant-garde fait surface et devient l'ACIDE, quelques explications et un flash-back " (L. Skorecki, in Cahiers du cinéma n° 294, novembre 1978), " Nouvelles de l'underground (bis) " (" mise au point " de Cl. Eizykman et G. Fihman in Cahiers du cinéma n° 297, février 1979), " Nouvelles de l'underground (ter) " (réponse de P. Kirchhofer, non publiée).

. 1re A.G. de l'ACIDE 18/11/78) : statuts et règlement intérieur de l'ACIDE, un tract de Marc Berri, un autre de la Commission des Cinéastes et Artistes Audiovisuels réunie autour de Maurice Lemaître : "De la brioche à la visionneuse 3 ans d'avance !".

. 2e A.G. de l'ACIDE (02/06/79) : " Rapport moral " (M. Mazé) et diverses " Propositions-motions de la Coopérative du cinéma marginal soumises aux votes de cette assemblée ".

. Trente ans de cinéma expérimental en France (1950 - 1980), D. Noguez, Paris, ARCEF, 1982.

. " Cinéma indépendant différent expérimental - Le colloque de Lyon ", retranscription littérale et mot à mot faite par P. Kirchhofer, mai 1994.

. Merci enfin à ceux qui ont bien voulu répondre à mes questions et m'ouvrir leurs archives : Maria Klonaris et Katerina Thomadaki, Raphaël Bassan, Marcel Mazé, Jack Gajos, Rose Lowder, Claudine Eizykman et Guy Fihman, Christian Lebrat et tout particulièrement Patrice Kirchhofer pour la colossale retranscription qu'il a faite du colloque de Lyon.


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