Chérie, je me sens indépendant
un.oeil.bien.sur,il.te.parle.et.te.poursuit...

 

Le terme d'indépendance, que le premier n° de 101 arborait d'ailleurs avec ostentation, tient aujourd'hui un rôle aussi équivoque dans le cinéma que celui de l'humanisme dans la philosophie des années 50. Ce qu'il désigne est plutôt obscur sinon tout à fait inepte.

De nos amis Maria Koleva et Marcel Hanoun jusqu'aux promoteurs du Cherry Coke en passant par Karmitz et Berri, la grande famille des "gens d'images" enfin unifiée s'y retrouve presque toute entière. Doit-on remercier Besson et Bouygues de donner encore un semblant de caractère à cette auberge espagnole ?

Peut-être y a-t-il plus qu'une lexicale ironie du sort dans le fait de retrouver les mêmes, tous, ligués contre l'innocemment nommé INDEPENDANCE DAY : l'indépendance n'est-elle pas justement partie prenante de l'illusion libérale ?

Cette valeur ajoutée abstraite cause plus de confusion qu'elle ne le paraît. Elle escamote sous un voile pudique de plus ou moins criantes disparités économiques : il y a un cinéma indigent et un cinéma opulent, la résistance ou la servilité n'y ont inévitablement pas la même teneur ni le même prix, mais elles existent dans l'un comme l'autre.

Que son utilisation soit cynisme calculé ou fourvoiement critique, cache-misère ou supplément d'âme, prenons garde à ce que les apôtres de l'indépendance ne nous convertissent pas à leur simplification consensuelle.

 

Jean Teste